En créant des contenus originaux pour le réseau social, la chaîne de télévision réunit un public jeune autour de questions de société et d’actualité.
En langage internet, une FAQ désigne une « Foire aux questions », le lieu où les utilisateurs peuvent demander des conseils, des avis, des informations à leurs marques ou créateurs de vidéos préférés. C’est une FAQ de société que propose ARTE sur Snapchat depuis juin 2019, à mille lieues de l’image de chaîne de télévision « intello-chiante » qui lui colle à la peau.
En s’installant sur la plateforme Snapchat, le premier objectif d’ARTE est de « sortir du ton descendant de la télévision traditionnelle », explique Lama Serhan, responsable de la création et de la production pour les réseaux sociaux. L’interactivité du « show » Snapchat permet en effet aux spectateurs de sortir de leur passivité et de répondre directement à l’émission. La question de la semaine est déclinée en trois questions, posées directement aux spectateurs. L’émission prend alors des airs de jeux avec un mini-quizz, ou de réseau social en lançant un sondage.
Vers une horizontalité du média vertical
Au-delà de l’aspect gadget que revêt la possibilité de réagir à la FAQ, l’interactivité permet aussi au public de choisir les sujets qu’il a envie de voir traités. « On a plusieurs fois eu des idées qui émergent dans les réponses aux sondages ou dans les messages privés que l’on reçoit. » Par exemple, les utilisateurs avaient très largement répondu au sondage « quelle est votre plus grande peur ? » en exprimant la crainte de perdre un proche. Quelques semaines plus tard, ARTE-FAQ sortait un show « Peut-on parler de la mort sur les réseaux sociaux ? ».
En alliant des récits d’anonymes et des témoignages de célébrités d’internet, de journalistes ou d’experts, ARTE-FAQ fait le tour de la question de la semaine en cinq ou six minutes de vidéo verticale. Le plus, c’est le design qui met en valeur le contenu. L’écriture vidéo et le graphisme prennent des formes originales visuellement « parce que le but d’ARTE, c’est toujours de favoriser la création et l’innovation dans les contenus ». La chaîne publique bénéficie d’ailleurs d’un net avantage sur ses concurrents, elle n’a pas d’objectifs de rentabilité. « Là où les chaînes privées cherchent à convertir les spectateurs à l’abonnement, on ne cherche pas à ce qu’ils nous suivent à la télévision ou sur les autres réseaux. On veut juste qu’ils voient nos contenus. »
Sexisme et écologie
Pourquoi les arbres sont-ils utiles ? Feriez-vous un test ADN ? Les religions sont-elles sexistes ? Les filtres Snap vous rendent-ils plus beaux ? En se penchant sur les préoccupations des moins de 25 ans, ARTE-FAQ cherche à offrir des clés de lecture aux plus jeunes sur les questions de société qui animent le débat. « On passe par des angles originaux pour rendre les sujets attractifs. En tant que service public, notre rôle est aussi de rapprocher les gens », rappelle Lama Serhan. Exemple : une vidéo qui commence par la mode des baskets pour au final évoquer l’aspect écologique de la consommation de fast fashion.
La recette semble fonctionner : certaines émissions atteignent le million de vues et les spectateurs se fidélisent. La durée moyenne de visionnage est un indicateur qui satisfait particulièrement les producteurs de l’émission : 1 minute 20 par vidéo, alors qu’elle n’est que de 16 secondes pour les vidéos publiées sur Facebook. Pour les producteurs de contenus comme ARTE, proposer de nouvelles formes d’écriture est le moyen le plus sûr de s’adapter aux nouveaux modes de consommation propres à l’information sur internet.
En arrivant sur Snapchat, la chaîne culturelle franco-allemande continue de rajeunir son image et son public via le numérique. Une opération amorcée il y a une dizaine d’années grâce aux lancements de plusieurs projets sur différentes plateformes du web. ARTE avait par exemple été la première en France à lancer un service de replay de ses émissions sur internet. « Aujourd’hui grâce à Snapchat on se rend compte que le public jeune est réceptif à ce qu’on fait, il n’y a qu’à aller le chercher », se réjouit la responsable du service. Le réseau social au petit fantôme blanc lui permet d’atteindre les 13-17 ans, cible difficile d’accès pour les médias d’information.
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